Monument aux Girondins

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Monument aux Girondins
Présentation
Type
colonne commémorative / fontaine monumentale
Architecte
Deverin
Construction
Hauteur
54 m.
Propriétaire
commune
Patrimonialité
Localisation
Pays
Commune
Coordonnées
Carte

Le monument aux Girondins, situé à Bordeaux place des Quinconces, a été élevé entre 1894 et 1901, à la mémoire des députés girondins victimes de la Terreur. Les Bordelais le nomment couramment « colonne des Girondins » ou « monument des Girondins ».

Il est classé au titre des monuments historiques depuis le , après avoir été inscrit le [1], le classement ayant été approuvé par le conseil municipal de Bordeaux le [2].

Histoire[modifier | modifier le code]

Dès 1868, l'architecte Julien Guadet, petit-neveu du député girondin Élie Guadet, établit un projet de monument à la mémoire des Girondins pour la place Dauphine[3] – actuelle place Gambetta –, à Bordeaux. C'est sur cette place que les dernières exécutions de députés girondins, dont Élie Guadet, et de leurs partisans, ont eu lieu en 1794. Exposé au Salon de Paris en 1870[3], le projet ne sera pas réalisé.

En 1881, le conseil municipal de la ville de Bordeaux prend la décision d'ériger un monument à la mémoire des députés du groupe des Girondins.

Le , le centre des allées de Tourny est choisi comme emplacement d'un monument surmonté d'une statue de la République et, le suivant, par arrêté, un concours est ouvert à tous les artistes français pour proposer un projet[4]. Au second tour, le premier prix est attribué en 1888 à Jules Labatut, statuaire, et Pierre Esquié, architecte, pour leur projet intitulé Alta fa qui pot (« Ainsi fait qui peut » en occitan).

Le projet de Labatut et Esquié ne sera cependant pas réalisé : c'est celui intitulé Gloria victis (« Gloire aux vaincus », en latin), présenté par le statuaire Alphonse Dumilatre et l'architecte Henri Deverin, arrivé second au concours[5], qui sera retenu après avoir été revu par Dumilâtre et l'architecte Victor Rich.

Cependant, dans le même temps, un autre projet était en cours pour orner la place des Quinconces d'une fontaine monumentale commandée à Bartholdi. La fontaine de Bartholdi est réalisée en 1888, mais le conseil municipal de la ville de Bordeaux juge son prix trop élevé, et c'est la ville de Lyon qui en fait l'acquisition pour l'ériger sur la place des Terreaux.

À la suite de l'échec des négociations avec Bartholdi, la ville de Bordeaux prend la décision de regrouper les deux projets — celui du monument aux Girondins, et celui de la fontaine — en n'en formant plus qu'un, celui d'un monument-fontaine qui sera érigé sur la place des Quinconces. Le projet de Dumilâtre et Rich est ainsi repris en lui adjoignant deux bassins.

L'emplacement du monument est choisi sur la place des Quinconces, à l'intersection de son axe longitudinal et du prolongement du cours du XXX-Juillet.

Le , les crédits sont votés par le conseil municipal et les travaux débutent en 1894 avec l'érection d'un échafaudage en bois de 54 mètres de hauteur. Ils se termineront en 1902. Toutefois, le projet ne sera pas réalisé en entier : bien que dédié aux Girondins, les deux groupes de statues représentant huit des principaux députés ne seront jamais réalisés et leurs emplacements sur le socle de la colonne, en arrière de chacune des deux fontaines, demeurent toujours inoccupés.

Les deux groupes de députés étaient formés[6] d'une part de Pierre Victurnien Vergniaud, François Buzot, Jérôme Pétion de Villeneuve, et Charles Jean Marie Barbaroux, et d'autre part d'Élie Guadet, Armand Gensonné, Jean-Antoine Grangeneuve, et Jean-Baptiste Boyer-Fonfrède :

Députés Girondins du projet initial

Le , est décidé le déboulonnage des ornements en bronze, dans le cadre de la mobilisation des métaux non ferreux, pour être fondus et expédiés vers l'Allemagne. La ville reçoit en dédommagement la somme d'1,5 million de francs[7]. Le déboulonnage commence à partir de mi-août 1943. Les ornements sont expédiés à la fonderie Savigner à Angers. Au lieu de les fondre, le fondeur les conserve et les restitue à la ville le 5 juillet 1945. Ils sont entreposés dans les hangars du port autonome, puis ils sont déplacés au 25 avenue du docteur Schinazi, au pied du pont d'Aquitaine. En 1968, une association se constitue pour réclamer la réinstallation des ornements. Après une campagne de presse, ils sont finalement réinstallés en 1983. La statuette représentant la Liberté, l'Égalité et la Fraternité, posée sur la sphère dans la main droite de la statue de la République assise de la fontaine sud a disparu, probablement volée.

En 1989, pour le bicentenaire de la prise de la Bastille, une plaque commémorative, gravée des noms de huit députés girondins, est apposée au monument. Le choix diffère du projet initial, les noms retenus étant ceux des huit membres du parti girondin effectivement députés du département de la Gironde[8].

Ainsi, les noms de seulement cinq des huit députés formant les deux groupes de statues prévus initialement se retrouvent sur cette plaque. Ceux de François Bergoeing, Jean-François Ducos, et Jacques Lacaze, ont été substitués à ceux de Barbaroux (député des Bouches-du-Rhone), Buzot (député de l'Eure), et Pétion (député d'Eure-et-Loir), morts tragiquement dans le département de la Gironde où ils avaient tenté de se réfugier en suivant Guadet.

Sept des députés mentionnés sur la plaque sont morts exécutés. François Bergoeing a fini naturellement sa vie à Bordeaux en 1829, après avoir notamment fait partie des membres du Comité de sûreté générale.

Description[modifier | modifier le code]

La colonne vue du côté de la fontaine

Il se compose d'un large socle encadré de deux bassins, ornés de chevaux et de groupes en bronze, et surmonté d'une colonne de 43 mètres où culmine (à 54 mètres de hauteur) la statue en bronze de la Liberté brisant ses chaînes.

Les groupes suivants figurent parmi les sculptures :

La réalisation de l'ensemble des sculptures a été partagée entre plusieurs fondeurs d'art avec la répartition suivante[9] :

  • la fonderie Denonvilliers[10] de Sermaize-sur-Sault (Marne) : les quatre chevaux-reptiles et la Liberté ;
  • les Établissements Leblanc-Barbedienne de Paris : le premier groupe réalisé pour le bassin de la République, « Le mensonge, le vice et l'ignorance » ;
  • les Établissements Durenne de Sommevoire (Haute-Marne) : « Le triomphe de la République », les coquilles, les grenouilles, les roseaux et les six enfants (le premier groupe de trois enfants représente le Commerce et l'Industrie, le second groupe évoque les Beaux-Arts)[11] ;
  • la fonderie du Val d'Osne (Haute-Marne) : la « République », le bassin du « triomphe de la Concorde », et les quatre chevaux-poissons.

La colonne a été réalisée par Alphonse Dumilatre et Victor Rich.

Critiques[modifier | modifier le code]

L'esthétique du monument a été parfois critiquée par les Bordelais eux-mêmes. François Mauriac juge ses proportions désastreuses : « Autour de la Colonne des Girondins, des républiques mafflues sont à sec dans un bassin minuscule[12] ». Jacques Ellul est critique envers sa sculpture : « Je ne vois pas en quoi cette espèce de, disons, de génie qui la couronne représente en quoi que ce soit une pensée révolutionnaire ou une spiritualité quelconque[13] ».

Galerie[modifier | modifier le code]

Allégorie de l'histoire fait face à le place des Quinconces

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • A. Gaston Cornié, « Le monument des Girondins à Bordeaux », La Nature,‎ , p. 61-62 (lire en ligne, consulté le ).
  • Ducos, Armand, A propos du monument des Girondins. Les Trois girondines : Mme Roland, Charlotte de Corday, Mme Bouquey, et les Girondins, étude de critique historique, Bordeaux, impr. de P. Cassignol, , 294 p. (lire en ligne)

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Inscription du Monument aux Girondins », notice no PA33000074, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture. Consulté le 27 août 2009
  2. Délibération 20100568 du Conseil municipal, le 25 octobre 2010.
  3. a et b Charles Vatel, Charlotte de Corday, et les Girondins, Plon, Paris, 1872, t. 3, p. 786
  4. F.-A. Aulard (rédacteur en chef), La Révolution française, revue historique, Charavay frères, Paris, 1887, t. 13, p. 378
  5. L'Artiste, revue de Paris, histoire de l'art contemporain, 1888, t. 2, p. 235
  6. La Nature, G. Masson, Paris, no 1151 du 22 juin 1895
  7. Brigitte Vital-Durand, « Bordeaux, 1er juillet 1940, 23 heures, l'horloge passe à l'heure allemande. Du 27 juin 1940 au 27 août 1944, chronique de l'Occupation au quotidien, dans la ville où Papon prend ses fonctions en mai 1942 », sur Libération, (consulté le ).
  8. Adolphe Granier de Cassagnac, Histoire des Girondins et des massacres de septembre, E. Dentu, Paris, 1860, t. 1, p. 5
  9. Ministère de la Culture et de la Communication - Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994
  10. « FONDERIES DENONVILLIERS », sur e-monumen.net (consulté le )
  11. Le monument aux Girondins, Bordeaux Découvertes
  12. Commencements d'une vie, 1932, p. 78 [1]
  13. Olivier Abel, Paul Ricoeur, Jacques Ellul, Jean Carbonnier, Pierre Chaunu: Dialogues, Labor et Fides, 2012, p. 70 [2]